L’expérience française montre que l’évolution du rôle de la pharmacie de la vente vers le service peut être une réussite. Mais cette décennie a-t-elle été une succession de succès ? Dans de nombreuses interviews, M. Bonnefond a souligné que les réformes de la tarification de 2015 et 2016 n’étaient pas bien planifiées et comprenaient un financement trop modeste pour les pharmacies. En 2017, la 11e modification de la conventuion pharmaceutique a été introduite, réglementant les honoraires de dispensation et les missions des pharmacies. Cette mesure a été soutenue par l’USPO, car l’un des plus importants représentants des pharmaciens doit exprimer son opinion sur les changements prévus dans le secteur au niveau de l’Assemblée nationale française. Les amendements de 2015 et 2016 n’ont pas reçu un tel soutien de la part du syndicat.
En 2010, les marges commerciales et les frais de service ont été séparés en France. À l’origine, un droit de dispensation de 1 € a été introduit pour chaque boîte de médicaments couvrant un mois de traitement. C’est également à cette époque que les premiers services pharmaceutiques ont été introduits pour aider les petites pharmacies périphériques. Ils gagnent environ 80 % de leur vie grâce aux médicaments remboursés, dont les prix augmentent alors que les marges diminuent. Le problème a été exacerbé par la désertification médicale. La profondeur du problème est démontrée par un arrêté municipal pris en février 2020 par 9 maires ruraux du département de la Sarthe. Le décret rend illégal le fait de „vouloir un accès urgent aux soins de santé” ou même de succomber à un accident ou à une maladie grave. Le contenu de la loi était grotesque, mais il avait pour but d’attirer l’attention sur le problème de l’accès aux soins de santé. Dans certaines régions de France, les pharmacies sont les seuls points de vente à remplir cette fonction. Il y avait aussi la ROSP, ou paiement ciblé de santé publique, pour la délivrance de médicaments génériques.
L’éventail des activités des pharmaciens français comprend également le „télésoin”, un type de téléconsultation où, dans le bureau de la pharmacie, le patient et le pharmacien consultent le traitement avec le médecin. C’est la réponse à la pénurie de personnel médical. Et finalement la pharmacie se téléporte.
La France est un pays de gens pragmatiques. À l’époque du COVID-19, lorsqu’il était nécessaire de produire des liquides désinfectants, nous avons pu lire des articles sur la pharmacie parisienne Delpech, qui a entrepris de les produire. A cet effet, une des rues de Paris, la rue Mignon, a été fermée et aménagée à l’usage de la pharmacie. Elle a ainsi pu fournir 10 000 litres de liquide par jour, desservant d’autres pharmacies, hôpitaux, pompiers, police ou maisons de retraite. La distribution de masques a également été effectuée par les pharmacies. Ces derniers jouent un rôle de plus en plus important en France. Les services financés constituent une part importante des revenus des pharmacies, mais comme vous pouvez le constater, ils doivent être financés en conséquence.
Le catalogue des pharmacies est également très différent en France. On en voit de petites, locales, dont M. Bonnefond souligne qu’elles sont les plus précieuses pour le patient, et de grandes, voire de gigantesques, comme la pharmacie parisienne du Forum des Halles, qui atteint 2050 mètres carrés.
L’évolution du financement est en corrélation avec les marges et le nombre de pharmacies qui ferment en France.
Depuis 2017, avec le 11e avenant, la situation économique semble s’améliorer lentement pour les pharmacies, et M. Bonnefond a déclaré dans une interview que „C’est pas fini”.